En ville


 

Tout ça ne va pas entrer tout seul dans mon carnet !
Le balancement des petites roses pompons au bout de leurs branches, le rouge-queue qui apparaît par surprise, queue en éventail, les bourdons velus, le délié des fleurs, le tapis vert, frais et épais où gambade une guêpe légère, les jets d'eau de la fontaine qui partent en effervescence moussue, leurs bruits saliveux qui s'apaisent en tintements de bulles, les cloches qui se déchaînent de tous côtés, les grosses sonnantes, les volées chantantes, les petits carillons, une demi-minute, pas plus, le soleil de midi qui reprend toute la place, la fontaine qui brumise au-dessus de sa surface de gris lac miroitant, le pigeon trottant à mes pieds, placide, rejoint par un autre décoré d'un somptueux manteau qu'il me fait admirer en hochant sa petite tête pointue, un moineau atterri tout près se porte dans ses pas. Dans mon dos, contre mon épaule, des petites fleurs couleur géranium traversent le dossier du banc. Des oiseaux-mouches en jupe noir et blanc et corsage noisette volettent et plongent délicatement leur invisible stylet dans les petites corolles blanches de fleurs étoilées perchées en comètes, réunies en bouquets dansants. Papillon qui surgit collé à la lumière chaude des avoines puis confondu à l'arête d'une feuille. Ombres de verts transparents dessinant leur découpe sur des larges palmes rondes. Ce n'est là qu'une place publique, qu'un axe de circulation pour les piétons, mais voilà qui rend heureuse la ville.
Bien sûr il y a des drames, des horreurs, des stupidités, des comportements morbides, des aveuglements qui continuent sans trop d'égards pour elle. Son bonheur, à elle, ne peut pas suffire...
sauf à voir les enfants, qui en sont la part la plus spectaculaire et indicible.

Affiche déchirée, photo de Marie Hubert

Commentaires