Au sortir

 

Au sortir d'un rêve – j'allais dire d'une rêverie, pour faire écho à Bachelard, mais non, c'est bien d'un rêve qu'il s'agit, puisque je m'endors vingt fois par jour, en lisant, en pensant, en écoutant, en écrivant, en mangeant même, je m'endors quelques minutes et je rêve. En sortant du rêve j'ai souvent des pensées révélatrices, ou bien je me souviens du rêve.
Au sortir de ce rêve-là, que j'ai maintenant oublié, j'ai eu cette pensée révélatrice que je m'accrochais aux mots, que je n'avais, et n'avais jamais eu que des mots à quoi m'accrocher... navet, je m'entends dire à l'instant, et aussitôt le vois apparaître, rose et blanc, tout juste sorti de terre. Je sens que les mots ouvrent la porte aux choses. Et par la fenêtre ouverte, c'est orgie de cigales et de moineaux, c'est une fringale, non pas de mots mais de musique estivale, une poêlée craquante, une fricassée, un régal de juillet grillé, croustillant et doré de soleil.

photo r.t