Voir et entendre

 


   Ce mois de juin, c'est une véritable ivresse permanente de chants d'oiseaux. Les merles sont les plus acharnés, les plus goulus. Je vais le long de la rivière, sous les grands arbres, ils me communiquent leur folie. Je me tiens dans leur compagnie de longs moments, happé par l'attention, suivant les trilles, les mélodies, les différents jeux, les silences et les déplacements, le plaisir à fleur de peau, engagé par tous mes sens comme dans une répétition d'orchestre.
Le temps passé à le vivre, le matin dehors, et le soir à l'écrire — tandis que d'autres oiseaux sont à l’œuvre, les martinets, plongeant et criant en pelotons groupés pour des tours de piste au ras de mes fenêtres — ce temps de regard aux oiseaux est quelque chose qui importe... sérieusement ! il ouvre les yeux, sur un futur, oh Rimbaud ! Quand irons-nous, par-delà les grèves et les monts, saluer la naissance du travail nouveau...
C'est dimanche matin, ai-je bien entendu ? Est-ce un dérèglement de tous les sens ? Ou y a-t-il une fête qui se prépare, ces sons de flûte, de clavecin, cette musique baroque, dans les rues, ces familles de balafons, ça chante dans les maisons, quelle est cette danse à petits pas déhanchés, qui emplit les rues... ?

Picasso, femme avec une casquette, 1934

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