Il se dit : Voilà, cette fois je suis vieux. Et puis, non, il se ravise, en enfilant sa veste, prêt à fermer sa porte. Soixante-dix ans, ça ne veut rien dire. C'est un refrain, une ritournelle. Ça n'est pas une pensée. Sa main tourne la clé dans la serrure – c'est une longue clé d'autrefois, en métal cuivré – son poids familier, son bruit claquant et rond vient jusqu'au cœur. Corps dansant déjà, plus loin, refermant la veste sur son torse, bombé, heureux comme un oiseau. Bien sûr ce n'est pas ce qu'on pourrait avoir imaginé comme vie – sans métier, sans souvenirs, sans amis – maintenant il en est bien conscient : il danse, il est musique. Comme un autre jour il est peinture. Corps jouant dans le corps immense de la nature, appartenant à tous, passant dans le regard de tous, artiste sans scène, sans partenaires, sans musiciens, qu'on admire pourtant et qu'on suit un instant dans la rue.
C'est peut-être bien, au fond, la seule vie qui pouvait être sienne. Eh quoi ! dit-il, en voilà une pensée. S'il a fallu soixante-dix ans pour en arriver à cet instant, qu'y a-t-il à redire ?
La clé à nouveau dans sa main, la clé gardienne, clé de sol et diapason.
C'est peut-être bien, au fond, la seule vie qui pouvait être sienne. Eh quoi ! dit-il, en voilà une pensée. S'il a fallu soixante-dix ans pour en arriver à cet instant, qu'y a-t-il à redire ?
La clé à nouveau dans sa main, la clé gardienne, clé de sol et diapason.
Peut-être que tant qu'on n'est pas mort, on n'est pas tout à fait vieux te murmure à l'oreille l'amie qui va bientôt amorcer sa 82ème année (écrit en chiffres, ça fait moins long).
RépondreSupprimerJe t'emprunte ta clé de sol pour, au diapason, soleil et terre, faire fleurir et danser la nature comme Victor Brauner en image.
Merci de ta complicité, chère Noëlle, et d'entrer dans la danse !
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