Je me promène sur le fil de mes pieds. Sur les plantes molles de mes pieds je promène le corps nerveux de mon animal.
Tout rabougris par la douleur électrique de sa matière vivante. La lune darde sa blancheur intense de cacahuète insolée.
Dans la maison éclaboussée de ce blanc lunaire, je tourne et retourne mes pensées comme un beignet. Comme fait l'araignée empaquetant sa proie.
Bientôt je serai étourdi, prêt à retrouver le sommeil.
La conscience, c'est cela peut-être : cette double nature d'araignée et de proie. Cette fusion de deux espèces en une. Le résultat d'un amalgame de tant de matières.
Dans la chaleur de la matière, je m'endors.
Magma.
—
C'est à croire que je doive passer par toutes les formes imaginables.
Déjà cette informe écriture, désertée de toute histoire, inapte à recevoir mon élan, juste capable de me ralentir, me canaliser dans sa voie de traverse, sa retraite errante.
Ce détournement permanent, chantonnant, batifolant même. Faire place à quelqu'un d'autre, toujours, pourquoi ? Tous ces autres que je fais expirer sur le pavé, la bouche ouverte, avant même de les mettre en marche, tapissant de leurs corps inertes de papier mâché une projection de route, refusant la vie aux fantômes... Haaa... Tuer... ne faisons-nous que ça ? Enfermer... Peindre dans les grottes et ensuite peindre ces grottes dans d'autres grottes. Depuis le début des temps de la conscience.
Il y a du vide. La conscience – l'étrange dédoublement – d'être un corps matériel, et seulement cela, est comme une falaise au-devant du vide.
Sculpture de Bernar Venet
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