du journal de la rivière
Il y eut aussi ce corps à corps, cet échange monstrueux, comme je le disais. C'est du passé. C'est du passé et c'est hors du passé. C'est compliqué et c'est tout à fait extraordinaire, comme ça l'a toujours été. Ça ne s'inscrit pas dans le temps, tout en s'y couchant, s'y abandonnant. S'y oubliant. Tous mes problèmes de temps sont résolus à cet endroit-là, à ce moment-là. C'est le jour où j'ai sauté dans la rivière. Ça ne se fait pas, elle est trop sale, trop pleine de remous dangereux. Pourtant c'était le temps, le moment pour le passage, la rencontre, l'aboutissement. J'avais sauté dans la rivière ! La surprise fut totale. Peut-être le froid, peut-être le chaud, peut-être l'éblouissement. Ce que le corps a ressenti c'est l'énergie, comme un monstrueux échange d'énergie, entre elle et moi. J'ai remis le pied sur la rive, titubant, ébloui. Je ne reconnaissais plus mes habits. Je ne reconnaissais plus l'endroit. Je n'étais plus le même, rien n'était plus le même. Et ne le sera plus. Peu à peu j'ai reconstruit le paysage, les chemins, l'espace et le temps. Mais la métamorphose a eu lieu.
Jérôme Bosch, détail du Jardin des délices
Expérience magnifiquement saisie par l’écriture. Fait resurgir chez moi l’enfant de la haute-mer de Supervielle et l’écriture souveraine de notre contemporain André Duprat. Amitiés de Joëlle Abed/Chartier
RépondreSupprimerTrès heureux de ce bouquet de rencontre. Merci Joëlle.
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